Le travail du chercheur en science humaine : enjeu, théorie, découverte

En sciences humaines, la statistique n'est pas le seul moyen d'établir des faits. D'une part , ceux-ci peuvent concerner d'immenses nombres,voire "tous" les Humains, qui ne se laissent pas ramener à un pourcentage quelque soit leur nombre. Mais un seul Humain peut être porteur d'une représentation ou d'un énoncé mythique qui peut,un jour ou l'autre, voire d'un millénaire à l'autre, faire retour avec toute son efficacité sur toute une société. Enfin, il peut porter ce fait potentiel de façon inconsciente-parce qu'inavouable dans son environnement sociétal. La découverte importante peut donc, dans ces disciplines, avoir l'aspect d'un objet anodin, d'un détail infime. L'art consiste alors
à le repérer au milieu d'autres, et d'en tirer le fil,aussi loin qu'il conduise. Et le filon, dès lors, peut être un trait concernant aussi bien 7 milliards de congénères ! Ainsi de la difficulté à fixer une "identité"-individuelle,sexuelle,parentale, politique, etc- dans le système langagier -toujours ouvert et dérivant- et des pathologies qu'entraîne nécessairement toute tentative de fermer et de perenniser un ordre sociétal.
Nous évoquerons ici quelques rencontres avec des découvertes de ce genre au cours de notre carrière de chercheur : le type de criminalité comme symptôme d'un genre de société (tueurs en série et en masse), l'objet de haine comme révélateur d'une structure sociétale (l'enfant-ancêtre comme ennemi de la société du village, le pédophile comme agent d'une société ennemie de la filiation, le "juif" comme objet d'une projection paranoïaque de la culpabilité occidentale), le quiproquo sur le meurtre du père comme source de la guerre civile créolisée entre fils des esclaves et fils des maîtres), la conversation interculturelle inconsciente comme solution à l'extermination mutuelle (en Europe occidentale),etc.